De douces retrouvailles... ft. Illiana Green & Shaba S. Skyness

Un nouveau jour se levait sur Praha. Enfin, si l'on pouvait appeler ça un jour, bien sûr. Ce qui était tout sauf dit. Voyez-vous, depuis l'apocalypse ayant frappé la Terre, les jours se suivaient sans se ressembler. Chaque nouveau matin était une source d'inquiétude pour les habitants terriens. Non pas qu'il y eut des habitants marsiens, mais vous comprenez. Et même si vous ne compreniez pas, ce n'était pas très grave. Ce n'était pas le sujet actuel !

Shaba avait déjà passé des années à voir le lever du soleil, à l'admirer, dans sa belle résidence universitaire à Oxford. C'était un spectacle rare et précieux, lorsqu'il ne pleuvait pas. L'Angleterre, tout ça... Durant l'apocalypse, elle avait été privée de cette vue pendant une année. Une année entière, enfermée dans un abri, en compagnie d'autres étudiants et professeurs. Autant dire que n'importe qui d'autre serait devenu complètement fêlé. Mais pas elle. Elle, elle avait l'habitude d'être avec ses semblables. Cela ne la dérangeait pas. De même, la présence des enseignants, ça ne la perturbait pas. Elle était même reconnaissante de leur présence. Cela lui permettait de garder pied et de ne pas s'enfoncer dans sa peur et son inquiétude pour sa famille.

Une fois sortie de l'abri, cela avait été une autre histoire. Tous les paysages désolés et détruits... ce n'était pas quelque chose à apprécier. Oh, elle se doutait bien que quelque part, un cinglé devait aimer voir ça, puisque ça signifiait qu'il avait survécu et pas les bâtiments, mais... pas elle. Shaba était une étudiante en Histoire, et en temps que telle, appréciait vraiment voir ces témoignages du passé. Là... le seul passé restant était constitué de ruines et de chagrin. Pas très folichon. Vraiment pas attrayant. Lors de son grand voyage vers Praha, Snorri avait vu de multiples paysages, certains totalement détruits, d'autres plutôt bien conservés. Ces derniers avaient sa préférence, ils lui laissaient l'espoir de revoir sa famille, son frère, même si elle était lucide et savait pertinemment qu'il y avait peu de chances qu'ils soient encore en vie. Après tout, une famille de 6 personnes... la probabilité qu'il y ait plus d'un survivant avoisinait le zéro pointé. Un jour, elle se ferait une raison... un jour. Pas aujourd'hui.

D'ailleurs, aujourd'hui était un jour calme. Rien n'était prévu... officiellement. Uniquement du repos, et de l'aide aux personnages en désirant. Des discussions simples. Shaba n'était peut-être pas dans l'armée ou psychologue, mais elle pouvait aider en parlant, en écoutant. C'était très important, l'écoute. Officieusement, elle avait fait passer le mot très discrètement à Illiana Green de venir la retrouver dans leur endroit habituel, dans les ruines des anciens palais. Ainsi, les deux jeunes femmes pourraient passer un moment à discuter, à échanger sur des sujets plus ou moins sérieux, plus ou moins importants. Leurs rencontres mettaient du baume au cœur de Shaba, les deux attendaient des nouvelles de leurs familles respectives... les deux se comprenaient. Et au fur et à mesure de ces rencontres, Shaba avait autorisé Illiana à l'appeler Snorri, lui témoignant de la confiance et de l'amitié.

En circulant à travers les ruines, les rues dévastées, la jeune enseignante aux cheveux si colorés dans ce désespoir salua les réfugiés, d'un hochement de tête, d'un sourire, d'un signe de la main, d'un petit salut vocal. Tous la connaissaient. Elle les connaissait tous. Après tout, ils étaient dans le même bateau, chacun d'entre eux. Et Shaba était plurilingue, un avantage certain dans un melting pot pareil. Elle se glissa ensuite dans les ruines, esquivant des débris, traçant son chemin d'un pas sûr. Enfin, elle atteignit leur coin privé, uniquement à elles deux. L'anglo-norvégienne s'installa par terre, en attendant son amie, sifflotant doucement un air de son enfance. Son ventre gargouillait, mais elle n'y prêtait pas attention, pas pour le moment en tout cas. Elle pouvait tenir avec un repas par jour, et donnait le reste aux enfants et aux vieilles personnes. Tandis que d'autres auraient vu comme un geste charitable d'abandonner les anciens à mourir, Snorri préférait s'en occuper avec douceur et respect. Les Anciens étaient le terreau de l'Histoire, ceux qui savaient plus encore, qui avaient vécu. Parmi eux, certains avaient vécu la Seconde Guerre Mondiale. Pas n'importe quoi donc.

« Bonjour Illiana ! » sourit Shaba lorsqu'elle entendit le pas si reconnaissable de son amie. Lui adressant un doux sourire, elle l'invita d'un geste à s'asseoir en face d'elle.